Au XIXème siècle, l'État ne finance pas la recherche scientifique. Les grandes entreprises possèdent leurs propres laboratoires et les financements publics ne se généraliseront qu'après la première Guerre Mondiale. Le financement de laboratoires par de grands industriels n'est pas seulement intéressé. Ceux-ci agissent par philanthropie, par goût du prestige ou par idéalisme. Souvent, les industriels créent des instituts modèles où est pratiquée une recherche de haut niveau, sans projet particulièrement défini. On y pratique une science qui se veut « utilitaire » et pertinente socialement.

À l'époque de la construction de la Cité Scientifique au Parc Léopold, la personnalité civile fait encore défaut à l'Université, ce qui lui interdit, à l'inverse des universités d'Etat de Gand et de Liège, de prendre des initiatives et de se doter de nouvelles installations. Par ailleurs, la Ville, dont l'ULB dépend, n'a pas les moyens de l'aider. D'où l'importance du mécénat.
La construction de deux Instituts de physiologie (recherche fondamentale et recherche et enseignement) est annoncée par  Ernest Solvay en 1892. Grâce à Paul Héger, qui parvient à y intéresser les frères Solvay, Léon Lambert, Georges Brugmann, et Fernand Jamar.
 

Eugène Goblet d'Alviella   -     Paul Héger
 

Léo Errera     -    Ernest Solvay

Ils seront inaugurés en 1895, auprès des Instituts d'Anatomie-Dissection, de Physiologie, d'Hygiène, de Bactériologie et de Thérapeutique, installés à la Cité des sciences au Parc Léopold. Raoul Warocqué fiancera les Instituts d'Anatomie et d'Histologie. En 1891-1892 on construit également l'Institut de Botanique financé par Léo Errera, sis Bd. Botanique.
 
Institut d'Anatomie Warocque (N 72)    Institut d'Anatomie Warocque Dissection (N 73)
Institut d'Anatomie Warocqué
 
   Institut d'Hygiene et de bacteriologie - Labo (N 75)
Institut d'Hygiène et de bactériologie

La création de ces Instituts a de nombreuses conséquences positives, parmi lesquelles l'imprégnation de plus en plus grande chez les étudiants de l'importance de la recherche scientifique et de la place de l'expérimentation qui rejaillit sur les cours théoriques d'une part, et fait naître une génération de chercheurs d'autre part, permettant d'accélérer le processus de promotion des laboratoires et de la recherche scientifique. Sous la houlette de  Paul Héger, les interactions se font nombreuses entre les Instituts et la faculté de médecine. Ce travail sera couronné par le transfert, en 1930, des laboratoires des Instituts dans les nouveaux locaux de la Faculté de Médecine Porte de Hal.


Dès 1894, Ernest Solvay projette la création d'un Institut de Sciences Politiques et Sociales. Il tient à ouvrir un Institut de recherche pure qui permette de faire vérifier ses théories par des spécialistes. Mais ne recevant pas de soutien, il l'installe d'abord lui-même rue Ravenstein, dans des locaux loués à la Ville. Voulant par la suite donner à l'Institut un statut plus officiel, il passe un accord avec la Ville en 1901, où, comme pour l'Institut de Sociologie, la ville cède un terrain pour une durée déterminée, en échange de la construction d'un bâtiment, lequel, au terme de cet accord, devient propriété de la Ville. Ernest Solvay nomme Émile Waxweiler directeur. Le bâtiment est inauguré en 1902 et reçoit des critiques très élogieuses dans la presse.
 
En 1904, l'École de Commerce, dont Ernest Solvay a chargé Émile Waxweiler [Photographie ci-contre] de la création, est inaugurée au Parc Léopold également. Quant à l'Institut de Sociologie E. Solvay, il fait suite à une première tentative de création d'un Institut des Sciences Sociales en 1894. Mais suite à un conflit entre Solvay et ses collaborateurs (1900) sur les conceptions du mécène, le projet est liquidé. En 1967, toutes les sections de Sociologie sont regroupées dans le nouveau Bâtiment S. Il prendra en 1959, le nom d'Institut de Sociologie de l'ULB. En regroupant toutes ces activités au Parc Léopold, Ernest Solvay est parvenu à en faire un ensemble scientifique cohérent. En mêlant recherche, enseignement, sciences de la vie et de la société, Ernest Solvay a rendu concrète l'interdisciplinarité qui, à ses yeux, était indispensable à l'avancée de la connaissance.
 
Par ailleurs, en 1907,  Antoine et  Marie Depage fondent l'Ecole Belge d'Infirmières Diplômées, dont ils confient la direction à Edith Cavell. En 1909, grâce au legs de Brugmann aux Hospices de Bruxelles et à l'Université, on construit un Sanatorium à Alsemberg.
 
Suite à ses contacts avec des savants étrangers, Ernest Solvay décide d'organiser une réunion internationale consacrée à la Physique. Elle a lieu à Bruxelles en 1911. C'est le premier des Conseils de Physique Solvay. Onze des vingt-et-un savants présents à ce conseil seront consacrés Prix Nobel. Ernest Solvay finance entièrement cette réalisation en créant respectivement, en 1912 et 1913, les Instituts Internationaux de Physique et de Chimie. Ces derniers seront hébergés à l'Institut de Physiologie. Au moment de sa liquidation, l'Institut international de Physique sera transféré à l'ULB. 
 
  
Conseil de Physique. 1911
 
Le soutien financier ne s'arrête ni à la Cité des sciences, ni à la mort d'Ernest Solvay. Le Comité Solvay (les frères Ernest et Alfred) apportera le financement complémentaire nécessaire à celui de la Commission for Relief in Belgium pour la réalisation du campus du Solbosch, et plus particulièrement de l'École polytechnique.
 
 
Ecole de Commerce Solvay. Parc Léopold
 
Adèle Solvay fait don d'une très importante bibliothèque scientifique. Les enfants d'Alfred Solvay poursuivent le soutien apporté à Jules Bordet. Les Tournay-Solvay font un don important pour l'édification de la Cité estudiantine en 1930 et enfin, la famille Solvay apporte à elle seule un quart de la somme nécessaire à la constitution des fonds pour la création du FNRS en 1928.

Pour en savoir plus :
  •  DESPY-MEYER et DEVRIESE Didier : Ernest Solvay et son temps, Archives de l'ULB, 1997.
  •  GOBLET d'ALVIELLA Eugène : 1884-1909, l'Université de Bruxelles pendant son troisième quart de siècle, Bruxelles, M.Weissenbruch, 1909.
  •  VANDERKINDERE Léon : L'Université Libre de Bruxelles 1834-1884, notice historique, Bruxelles, P. Weissenbruch, 1884.
  •  L'Université Libre de Bruxelles pendant vingt-cinq ans : 1834-1860, Bruxelles, Fr. Van Meenen and Cie, 1860.
  • La création des Instituts Solvay est détaillée dans "The Solvay Science Project"