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Histoire de l'ULB - L'Université, l'Etat et l'Enseignement supérieur
Une législation pour le moins fluctuante
L'ULB va longtemps se trouver en butte aux mauvais vouloirs gouvernementaux ainsi qu'à la promulgation d'une série de lois organiques qui, dès le début, ont une forte tendance à lui nuire. Entre autres, un règlement et une composition du Jury Central défavorables et l'impossibilité d'obtenir la personnalité civile (ce qui interdit à l'université de posséder des bâtiments, de recevoir dons et legs ou de conclure des contrats). Au cours de ses 125 années d'existence, l'ULB devra ainsi passer par toutes les situations qu'entraînent les fluctuations de la loi : de la liberté impécunieuse à la subsidiation liberticide (André Vanwelkenhuysen).
Première d'une longue série, la loi organique de l'enseignement supérieur du 27 septembre 1835 met toutes les universités belges sur pied d'égalité. Elle laisse les universités de Liège et Gand à l'État et vote la suppression de l'université de Louvain. Immédiatement, le clergé signe avec le Gouvernement en octobre 1835 une convention par laquelle on lui cède les locaux, l'importante bibliothèque, les collections et - en sus - les bourses de fondation allouées à l'ancienne Université de Louvain. Cette véritable spoliation de la chose publique au profit du parti des évêques provoque une polémique mais l'Université catholique entre en possession de ses biens dès décembre.
Dans le même temps, la loi organique de 1835 crée le Jury Central. Pour chaque grade, ce jury est composé de sept membres désignés chaque année comme suit : deux par la Chambre, deux par le Sénat et trois par le Gouvernement. Les libéraux dénoncent ce projet, très favorable à l'Université catholique, mais n'obtiennent pas gain de cause. Les abus ne se font pas attendre : la majorité cléricale des deux Chambres donne systématiquement ses suffrages aux professeurs de Louvain. Malgré les protestations, cette situation se maintient jusqu'en 1844. L'autre conséquence fâcheuse de cet état de fait est que les membres des jurys n'étant pas professeurs, ils n'ont pas la moindre idée de ce que l'on peut réclamer aux récipiendaires. Les matières sont de surcroît mal délimitées et les étudiants en sont victimes.
En 1844, on propose au Roi de nommer un jury dont la représentation par université serait équitable, mais le projet est rejeté. En avril 1844, on modifie cependant quelques aspects de la nomination de ce jury : on ne peut nommer plus de deux personnes du même établissement dans un jury, ni être nommé plus de deux années consécutives. Mais ces dispositions laissent toutefois la possibilité, en creux, de ne pas nommer de professeurs de l'ULB mais un membre étranger au corps professoral. Mêmes abus, mêmes réclamations !
En 1847, la Chambre passe à la majorité libérale. L'année précédente, Charles Rogier avait inscrit à son programme la réforme des jurys d'examens. En 1847 toujours, le Conseil d'Administration de l'ULB a introduit une réclamation par laquelle il demande que les étudiants aient dans leur jury au moins un professeur dont ils ont suivi le cours (ils n'obtiendront de solution équitable qu'en 1849).
En premier lieu, Charles Rogier propose que les jurys comportent un nombre égal de professeurs issus des universités libres et des universités d'État. Il rencontre là une vive opposition de l'ULB qui demande que les membres du jury soient élus par leurs collègues dans les quatre universités. Après quatorze ans de lutte, ils obtiennent finalement que soit inscrit dans l'article 40 de la loi organique de 1849 que le Gouvernement composera chaque jury d'examen de telle sorte que les professeurs de l'enseignement privé et ceux de l'enseignement public s'y trouvent en nombre égal. On est alors dans un système de jurys combinés.
Par ailleurs, la loi organique de 1849 introduit des innovations telles la création de nouveaux grades dans les différentes facultés mais modifie peu les programmes des cours et des examens. Par contre - autre sujet brûlant - elle rend obligatoire l'examen d'admission à l'université en créant le grade d'élève universitaire et en en déterminant précisément le contenu. Cette mesure provoque de vives discussions, certains soutenant qu'en imposant cette épreuve, les étudiants ne travaillent que dans le but de la réussir et non de s'enrichir intellectuellement. Verhaegen fait partie de ceux qui craignent que ce système n'affaiblisse les études. Il propose donc à la Chambre d'abolir cette motion et sa proposition est adoptée en février 1855. Retour, donc, au libre accès à l'université.
En 1850, la loi organique de 1849 est complétée : des jurys universitaires siègent dans chaque ville universitaire tandis que le Jury Central siège à Bruxelles pour chaque grade. De plus, le même jury siège pour une université de l'Etat et une université libre et commence alternativement d'année en année par l'une des deux pour se transporter dans l'autre. Ainsi, les professeurs de l'ULB siègent alternativement avec ceux de Liège et Gand, mais jamais avec ceux de Louvain ! Ce principe voté, à l'origine, pour trois ans est reconduit jusqu'en 1857. L'effet de la suppression de toutes garanties sur le niveau des études ne se fait pas attendre et bon nombre d'élèves non préparés échouent en masse.
En 1857, le Ministre de l'Intérieur propose que les étudiants aient suivi un cycle d'études complètes et qu'un examen en fasse la preuve. Cette proposition n'aboutit finalement qu'à la demande d'un certificat d'études moyennes, l'examen d'entrée n'est exigé qu'en cas d'absence de ce certificat.
Ces atermoiements ne seront qu'un prélude à la longue discussion qui aboutira à la loi organique du 1er mai 1857. Les détracteurs des jurys combinés y proposent des solutions toutes plus farfelues les unes que les autres. La Chambre, perdue, reconduit la décision de 1849 mais se laisse, par contre, entraîner à entériner les cours à certificats. Pour obtenir ce titre, il est obligatoire d'assister aux cours, mais il n'y a pas d'autres conditions que la présence en classe pour obtenir ce certificat. La loi de 1857 est donc dans notre enseignement supérieur, le signal d'un recul marqué. Elle n'apporte pas la moindre stabilité. En conséquence, dès 1861, Charles Rogier propose de rétablir un examen d'entrée qui délivrerait le titre de Gradué en lettres et dont l'épreuve serait allégée par rapport à celle du grade d'élève universitaire de 1849. On crée même une année de propédeutique qui dispense ce graduat ès-lettres nécessaire à l'inscription en Candidature. La droite attaque violemment ce projet qualifié d'oppression intellectuelle, mais la majorité suit Rogier. Le graduat en lettres est donc inséré dans la loi de 1857, qui se maintient sous cette forme jusqu'en 1876.
Après l'acharnement des défenseurs ou opposants des jurys combinés et du jury central, des examens d'admission ou non... un autre problème se profile : l'accroissement incessant du nombre d'étudiants. Une commission d'examen ne peut remplir cette tâche à elle seule, sauf à y passer quatre mois. Frère-Orban propose alors d'accorder aux universités le droit de délivrer elles-mêmes leurs diplômes et de réserver à une commission gouvernementale le soin de vérifier la conformité de ces titres aux prescrits légaux. La droite accueille favorablement cette proposition.
L'ULB craint que certains n'abusent de cette liberté nouvelle. Elle est tout à fait opposée au projet de rendre les professions libérales accessibles à tous car - selon Mr. Vanderkindere - les professions de médecin, d'avocat et de pharmacien exigent de sérieuses garanties, [...] dire que le public saura, parmi la masse des praticiens, distinguer ceux qui méritent sa confiance, c'est préjuger une question bien grave, c'est oublier aussi l'expérience journalière qui nous montre le foule toujours prête à se laisser séduire par les plus fallacieuses promesses.
Le régime de la loi organique de 1876 approuve toutefois cette mesure, détermine le contenu des programmes et la durée des cycles. Il supprime le Graduat ès-lettres. On accuse cet examen d'être trop facile, on reproche aux jurys leur extrême indulgence et aux étudiants, une ignorance lamentable.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la loi sur les grades académiques de 1890 modifie à nouveau le contenu des programmes et les cycles, mais sans toucher aux principes généraux des lois précédentes. Elle exige à nouveau la détention d'un diplôme d'humanités complètes pour pouvoir s'inscrire à l'Université. Ce régime se maintient pratiquement sans changement jusqu'à nos jours.
L'ULB va longtemps se trouver en butte aux mauvais vouloirs gouvernementaux ainsi qu'à la promulgation d'une série de lois organiques qui, dès le début, ont une forte tendance à lui nuire. Entre autres, un règlement et une composition du Jury Central défavorables et l'impossibilité d'obtenir la personnalité civile (ce qui interdit à l'université de posséder des bâtiments, de recevoir dons et legs ou de conclure des contrats). Au cours de ses 125 années d'existence, l'ULB devra ainsi passer par toutes les situations qu'entraînent les fluctuations de la loi : de la liberté impécunieuse à la subsidiation liberticide (André Vanwelkenhuysen).
Première d'une longue série, la loi organique de l'enseignement supérieur du 27 septembre 1835 met toutes les universités belges sur pied d'égalité. Elle laisse les universités de Liège et Gand à l'État et vote la suppression de l'université de Louvain. Immédiatement, le clergé signe avec le Gouvernement en octobre 1835 une convention par laquelle on lui cède les locaux, l'importante bibliothèque, les collections et - en sus - les bourses de fondation allouées à l'ancienne Université de Louvain. Cette véritable spoliation de la chose publique au profit du parti des évêques provoque une polémique mais l'Université catholique entre en possession de ses biens dès décembre.
Dans le même temps, la loi organique de 1835 crée le Jury Central. Pour chaque grade, ce jury est composé de sept membres désignés chaque année comme suit : deux par la Chambre, deux par le Sénat et trois par le Gouvernement. Les libéraux dénoncent ce projet, très favorable à l'Université catholique, mais n'obtiennent pas gain de cause. Les abus ne se font pas attendre : la majorité cléricale des deux Chambres donne systématiquement ses suffrages aux professeurs de Louvain. Malgré les protestations, cette situation se maintient jusqu'en 1844. L'autre conséquence fâcheuse de cet état de fait est que les membres des jurys n'étant pas professeurs, ils n'ont pas la moindre idée de ce que l'on peut réclamer aux récipiendaires. Les matières sont de surcroît mal délimitées et les étudiants en sont victimes.
En 1844, on propose au Roi de nommer un jury dont la représentation par université serait équitable, mais le projet est rejeté. En avril 1844, on modifie cependant quelques aspects de la nomination de ce jury : on ne peut nommer plus de deux personnes du même établissement dans un jury, ni être nommé plus de deux années consécutives. Mais ces dispositions laissent toutefois la possibilité, en creux, de ne pas nommer de professeurs de l'ULB mais un membre étranger au corps professoral. Mêmes abus, mêmes réclamations !
En 1847, la Chambre passe à la majorité libérale. L'année précédente, Charles Rogier avait inscrit à son programme la réforme des jurys d'examens. En 1847 toujours, le Conseil d'Administration de l'ULB a introduit une réclamation par laquelle il demande que les étudiants aient dans leur jury au moins un professeur dont ils ont suivi le cours (ils n'obtiendront de solution équitable qu'en 1849).
En premier lieu, Charles Rogier propose que les jurys comportent un nombre égal de professeurs issus des universités libres et des universités d'État. Il rencontre là une vive opposition de l'ULB qui demande que les membres du jury soient élus par leurs collègues dans les quatre universités. Après quatorze ans de lutte, ils obtiennent finalement que soit inscrit dans l'article 40 de la loi organique de 1849 que le Gouvernement composera chaque jury d'examen de telle sorte que les professeurs de l'enseignement privé et ceux de l'enseignement public s'y trouvent en nombre égal. On est alors dans un système de jurys combinés.
Par ailleurs, la loi organique de 1849 introduit des innovations telles la création de nouveaux grades dans les différentes facultés mais modifie peu les programmes des cours et des examens. Par contre - autre sujet brûlant - elle rend obligatoire l'examen d'admission à l'université en créant le grade d'élève universitaire et en en déterminant précisément le contenu. Cette mesure provoque de vives discussions, certains soutenant qu'en imposant cette épreuve, les étudiants ne travaillent que dans le but de la réussir et non de s'enrichir intellectuellement. Verhaegen fait partie de ceux qui craignent que ce système n'affaiblisse les études. Il propose donc à la Chambre d'abolir cette motion et sa proposition est adoptée en février 1855. Retour, donc, au libre accès à l'université.
En 1850, la loi organique de 1849 est complétée : des jurys universitaires siègent dans chaque ville universitaire tandis que le Jury Central siège à Bruxelles pour chaque grade. De plus, le même jury siège pour une université de l'Etat et une université libre et commence alternativement d'année en année par l'une des deux pour se transporter dans l'autre. Ainsi, les professeurs de l'ULB siègent alternativement avec ceux de Liège et Gand, mais jamais avec ceux de Louvain ! Ce principe voté, à l'origine, pour trois ans est reconduit jusqu'en 1857. L'effet de la suppression de toutes garanties sur le niveau des études ne se fait pas attendre et bon nombre d'élèves non préparés échouent en masse.
En 1857, le Ministre de l'Intérieur propose que les étudiants aient suivi un cycle d'études complètes et qu'un examen en fasse la preuve. Cette proposition n'aboutit finalement qu'à la demande d'un certificat d'études moyennes, l'examen d'entrée n'est exigé qu'en cas d'absence de ce certificat.
Ces atermoiements ne seront qu'un prélude à la longue discussion qui aboutira à la loi organique du 1er mai 1857. Les détracteurs des jurys combinés y proposent des solutions toutes plus farfelues les unes que les autres. La Chambre, perdue, reconduit la décision de 1849 mais se laisse, par contre, entraîner à entériner les cours à certificats. Pour obtenir ce titre, il est obligatoire d'assister aux cours, mais il n'y a pas d'autres conditions que la présence en classe pour obtenir ce certificat. La loi de 1857 est donc dans notre enseignement supérieur, le signal d'un recul marqué. Elle n'apporte pas la moindre stabilité. En conséquence, dès 1861, Charles Rogier propose de rétablir un examen d'entrée qui délivrerait le titre de Gradué en lettres et dont l'épreuve serait allégée par rapport à celle du grade d'élève universitaire de 1849. On crée même une année de propédeutique qui dispense ce graduat ès-lettres nécessaire à l'inscription en Candidature. La droite attaque violemment ce projet qualifié d'oppression intellectuelle, mais la majorité suit Rogier. Le graduat en lettres est donc inséré dans la loi de 1857, qui se maintient sous cette forme jusqu'en 1876.
Après l'acharnement des défenseurs ou opposants des jurys combinés et du jury central, des examens d'admission ou non... un autre problème se profile : l'accroissement incessant du nombre d'étudiants. Une commission d'examen ne peut remplir cette tâche à elle seule, sauf à y passer quatre mois. Frère-Orban propose alors d'accorder aux universités le droit de délivrer elles-mêmes leurs diplômes et de réserver à une commission gouvernementale le soin de vérifier la conformité de ces titres aux prescrits légaux. La droite accueille favorablement cette proposition.
L'ULB craint que certains n'abusent de cette liberté nouvelle. Elle est tout à fait opposée au projet de rendre les professions libérales accessibles à tous car - selon Mr. Vanderkindere - les professions de médecin, d'avocat et de pharmacien exigent de sérieuses garanties, [...] dire que le public saura, parmi la masse des praticiens, distinguer ceux qui méritent sa confiance, c'est préjuger une question bien grave, c'est oublier aussi l'expérience journalière qui nous montre le foule toujours prête à se laisser séduire par les plus fallacieuses promesses.
Le régime de la loi organique de 1876 approuve toutefois cette mesure, détermine le contenu des programmes et la durée des cycles. Il supprime le Graduat ès-lettres. On accuse cet examen d'être trop facile, on reproche aux jurys leur extrême indulgence et aux étudiants, une ignorance lamentable.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la loi sur les grades académiques de 1890 modifie à nouveau le contenu des programmes et les cycles, mais sans toucher aux principes généraux des lois précédentes. Elle exige à nouveau la détention d'un diplôme d'humanités complètes pour pouvoir s'inscrire à l'Université. Ce régime se maintient pratiquement sans changement jusqu'à nos jours.
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